L’automobiliste souffre-douleur du Système
L’automobiliste est le souffre-douleur et la vache à lait des gouvernements successifs. Alors que depuis plusieurs décennies le nombre de morts et de blessés sur les routes de France et de Navarre n’a cessé de diminuer du fait de l’amélioration de l’état tant des véhicules que de la chaussée et des mesures de sécurité comme la ceinture, on ne cesse de traiter le conducteur en suspect voire en ennemi. On le considère comme un délinquant sinon comme un criminel en puissance et on multiplie les mesures de répression qui finissent par devenir non seulement trop rigoristes mais contre-productives. Malgré la forte mobilisation des camionneurs pendant presque tout l’été 1992, peu avant le référendum sur Maastricht, nous n’avons hélas pas échappé au permis à points que ne connaissent pas plusieurs de nos voisins européens dont les habitants d’outre-Quiévrain. Fort heureusement pendant une dizaine d’années les pertes de points étaient relativement rares, les forces de l’ordre faisant preuve de compréhension et distinguant entre les graves infractions au code de la route pouvant mettre en danger la vie d’autrui et de légers dépassements de vitesse. Tel n’est plus le cas depuis l’arrivée de Sarkozy au ministère de l’Intérieur en 2002 puis à l’Elysée en 2007.
De fait, les mesures sécuritaires qu’il avait annoncées pendant sa campagne présidentielle ont été prises essentiellement non contre les voyous et les assassins mais contre les automobilistes. C’est certes plus facile, l’on a les victoires qu’on mérite mais depuis plusieurs années nous assistons à une vraie traque des chauffeurs, à un racket généralisé et il n’est aucune indulgence à attendre de la police ou de la maréchaussée. Même en veillant à respecter scrupuleusement le code de la route, lorsque l’on conduit souvent, il est quasiment impossible de n’être pas flashé par un radar à un moment ou à un autre, surtout dans les zones limitées à 50km/h. Il est vite fait de perdre son permis. Et en effet ces dernières années ce sont plusieurs centaines de milliers de nos compatriotes qui se sont retrouvés à zéro point et donc privés de tout véhicule à moteur sauf à rouler à leurs risques et périls, et la peur au ventre, sans la précieuse carte rose délivrée par la préfecture de police. C’est d’ailleurs l’un des paradoxes les plus frappants de cette politique ultra-répressive appliquée sans discernement: de plus en plus de Français roulent privés de permis car pour leur vie sociale, familiale et professionnelle il leur est impossible de se passer de voiture. Voilà les absurdités auxquelles mènent des dispositions totalement ubuesques.
Et comme si cela ne suffisait pas le gouvernement Fillon en remet une louche. Les excès de vitesse de plus de 50km/h seront désormais des délits en première instance alors qu’ils étaient jusqu’à présent ainsi qualifiés juridiquement uniquement en cas de récidive, de sorte que le conducteur en infraction sera donc passible du tribunal correctionnel. Or, rouler à 140km/h sur une belle route droite, par temps ensoleillé, au lieu de 90km/h n’est pas une folie. On marche donc sur la tête! Par ailleurs, l’exécutif a décidé qu’un taux d’alcool supérieur à 0,8g/l serait sanctionné par un retrait de huit points sur le permis de conduire, contre six actuellement. L’utilisation du téléphone portable au volant vaudra une perte de trois points au lieu de deux. La circulation sur une bande d’arrêt d’urgence sera désormais sanctionnée d’un retrait de trois points et d’une amende de 135euros. Le 30mai, le ministre de l’Intérieur Claude Guéant a annoncé lors d’une conférence de presse dans la Somme que les panneaux signalant la présence de radars fixes seront bel et bien supprimés d’ici un an à un an et demi, sans doute au lendemain des élections présidentielle et législatives. A leur place, 200 radars dit “pédagogiques” seront installés en juin, puis 2000 d’ici à la fin de l’année, et le même nombre en 2012.
La pose de ces appareils coûte entre 3000 et 5000 euros l’unité, a précisé la déléguée interministérielle à la sécurité routière, Michèle Merli, ce qui n’est pas rien. Cette décision annoncée à la mi-mai d’enlever les panneaux indiquant les radars fixes avait suscité le courroux des députés UMP qui ont pu mesurer dans leur circonscription la colère des Français et qui craignent pour leur réélection. Devant la fronde des parlementaires de la majorité, Claude Guéant avait dans un premier temps annoncé que la décision était suspendue le temps de la concertation, contredisant le message de fermeté prononcé un peu plus tôt par le Premier ministre. Finalement les panneaux seront bien supprimés mais de manière graduelle et, à la différence de ce qu’avait voulu au départ le gouvernement, les avertisseurs de radars pour les automobilistes ne seront pas interdits en France mais transformés en appareils «pour signaler les zones dangereuses» a déclaré le titulaire de la place Beauvau qui n’a pas voulu se mettre à dos les fabricants de GPS et autres Coyotes, lesquels avaient manifesté bruyamment leur mécontentement.
Reste que, malgré cette légère inflexion du dispositif, l’automobiliste reste dans le collimateur du pouvoir. Les accidents de la route tuent environ 4000 personnes chaque année en France et les chiffres d’avril ont été assez mauvais avec 355 morts, soit près de 20% d’augmentation par rapport au même mois l’an dernier, d’où ces mesures répressives car l’objectif du gouvernement est d’atteindre les 3000 tués annuels. Mais là encore on légifère dans l’urgence, sous le coup de l’émotion. Aucune étude n’a été faite prouvant que le démontage des panneaux signalant les radars aura une quelconque influence positive sur la mortalité des conducteurs. Selon un sondage du 30mai d’Obea-InfraForces pour le quotidien gratuit 20minutes et pour France Info, 31% des personnes interrogées pensent d’ailleurs que cette décision n’aura aucun effet sur le nombre d’accidents, 60% estimant que ces nouvelles mesures sont prises pour «remplir les caisses de l’Etat».
Mais si nos compatriotes manifestent un certain courroux, il ne va pas très loin. En effet, Jean-Marie LePen fut le seul candidat à la présidentielle de 2007 à s’engager à supprimer le permis à points et il n’obtint au final que 10,44% des suffrages. La multiplication des radars exaspère les conducteurs mais, sauf un cas isolé il y a quelques années, il n’y eut jamais un seul commando pour neutraliser ces radars. On se plaint mais on ne fait rien. C’est toute la force des dirigeants qui nous oppriment. Ils peuvent tout se permettre, augmenter sans cesse les impôts et les taxes, dérembourser la plupart des médicaments, retarder l’âge du départ à la retraite, diminuer les prestations, faire venir par millions de la planète entière des immigrés logés, nourris, blanchis, pourchasser les Français avec des milliers de radars automatiques présents sur tout le territoire national, rien ne se passe. Cette apathie du grand nombre, ce grégarisme montre à quel point notre peuple, ou ce qu’il en reste, n’a plus de caractère, plus de force d’âme, plus d’envie de se battre et de résister à l’injustice et à l’oppression. Et qu’il semble mentalement prêt à tout accepter.
jeromebourbon@yahoo.fr