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15 mars 2013 5 15 /03 /mars /2013 11:44

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Par Scipion de Salm.

 

Hugo Chavez vient de passer le Styx. Il a présidé le Venezuela de sa première élection en 1998 à sa disparition en 2013, tout juste réélu pour la troisième fois à l’automne 2012, déjà très malade depuis au moins deux ans. Chavez a défini une nouvelle idéologie, le bolivarisme, d’après sa réinterprétation personnelle de l’action et la pensée de Simon Bolivar (1783-1830), vainqueur des colonisateurs espagnols et premier président de la Grande-Colombie (1819-1830). Cette république indépendante fédérée unifia brièvement le Venezuela, la Colombie — dont Panama — et l’Equateur.

 

UN PERSONNAGE CHARISMATIQUE

 

Hugo Chavez est né en 1954 dans une famille métissée rurale. Les vrais Blancs ou vrais Indiens sont rares au Venezuela, où les métis sont nettement majoritaires. Ses parents formaient un couple uni d’instituteurs, socialisants et patriotes, dans la campagne profonde, l’Etat de Barinas. A 17 ans, il rejoint l’armée, institution où il demeure, montant progressivement en grade, jusqu’à son incarcération pour le coup d’Etat manqué de 1992. Il est inconnu avant cette date ; sa participation à des loges politiques semi-secrètes de l’armée vénézuélienne influencées par la variante guévariste du castrisme, plus spontanéiste, latino-américaine et loin du monolithisme soviétique, est attestée. Le Venezuela a connu plusieurs expériences au XXe siècle de dictature nationaliste et socialisante, même si Chavez ne s’en revendique guère, dont Gomez (1908-1935) et Contreras (1935-1941).

 

LE BOLIVARISME POLITIQUE

 

Le bolivarisme offre une expérience politique et économique significative, car il s’applique sur un vaste pays de 920 000 kilomètres carrés, peuplé de près de 30 millions d’habitants. Outre le pétrole, il possède de nombreux gisements de gaz, ainsi que de minerais, principalement du fer. Les terres cultivables offrent des surfaces considérables plutôt fertiles. Du fait de ces atouts considérables, une expérience nationaliste originale aurait pu réussir. Or le bilan est discutable.

Chavez a multiplié les réformes constitutionnelles, définissant un modèle original, présidentiel, avec un congrès monocaméral. Le président propose fréquemment des référendums aux citoyens, tous gagnés sauf un. On a souvent comparé en France cette pratique avec celle de De Gaulle dans les années 1960, insistant sur le lien direct entre les citoyens et la présidence, en ignorant les corps intermédiaires ; sur le plan purement technique, n’insultons pas Chavez en l’assimilant au plus grand traître de l’Histoire de France, on retrouve cependant des points communs, y compris dans l’usage de la télévision, avec son émission hebdomadaire Alo Presidente. A ce caudillisme, lien direct entre le chef et la Nation, guère original en Amérique latine, s’ajoutent une dimension gauchisante, une décentralisation du pouvoir avec une démocratie participative, multipliant les comités de quartier ou de village – dits “communaux” —, doublant d’ailleurs les municipalités légales maintenues . Un parti principal bolivarien encadre en principe le pays, appelé depuis 2007 PSUV, Parti Socialiste Unifié du Venezuela. Des milices politiques, plus ou moins armées, accompagnent les comités communaux ou les branches locales du PSUV, avec une rhétorique agressive de milices ouvrières et paysannes. En outre, l’armée, que Chavez aime beaucoup, est investie d’un rôle politique et social, en tant qu’école naturelle du patriotisme. Si les intimidations ne sont pas rares, il n’y a toutefois, curieusement, pas d’élimination physique organisée de l’opposition.

Aussi la politique bolivarienne se caractérise-t-elle concrètement, du fait de la multitude des institutions parallèles, par une certaine confusion. Ce manque de rationalité lui-même interdit de parler de stricte dictature néocastriste, malgré la présence de milliers de conseillers cubains. Une opposition bruyante se fait toujours entendre.

 

LE BOLIVARISME ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

 

Le projet économique de Chavez reste pour l’essentiel à l’état de discours de 1999 à 2003, des grandes idées généreuses, années durant lesquelles il se débat au milieu de l’obstruction systématique de l’oligarchie traditionnelle, économiquement néolibérale et politiquement proaméricaine. En 2002, Chavez est même renversé durant quelques jours par un coup d’Etat d’officiers supérieurs hostiles ; ces derniers ont abandonné rapidement face à la réaction populaire et devant le fait que leur ami Bush Junior n’a quand même pas osé soutenir vigoureusement un putsch militaire en Amérique renversant un président élu démocratiquement. En 2003, l’économie a été au bord de l’effondrement du fait de la grève violente et massive de la compagnie nationale pétrolière PDVSA, motivée politiquement, exigeant la démission de Chavez, suivant le mot d’ordre d’un syndicalisme corporatiste ; aussi près de 20 000 employés meneurs de grève ont été licenciés et remplacés par des partisans de Chavez. La socialisation de PDVSA, certes déjà partiellement publique, première entreprise du pays, constitue le prélude à beaucoup d’autres.

Avec l’argent en provenance directe désormais de la PDVSA, sont financées à partir de 2003 les nombreuses Misiones, qui ont pour ambition de quadriller le pays ; elles sont au moins présentes dans les bidonvilles des grandes villes. L’emploi du vocabulaire religieux est volontaire ; il s’agit de centres de soutien à la population pauvre, offrant des soins médicaux gratuits, l’éducation, en particulier l’alphabétisation des adultes. La même année est mis en place le réseau Mercal, des marchés d’alimentation, à prix bas, subventionnés, pour les pauvres. La limite de ces derniers est qu’ils connaissent des problèmes réguliers d’approvisionnement. Malgré des gaspillages évidents, l’action sociale de Chavez obtient des résultats indéniables : la pauvreté a diminué de moitié, passant de 50 % à 25 % de la population ; l’analphabétisme a aussi considérablement régressé, jusqu’à devenir rare. Face à la pénurie dramatique de logements, qui persiste, de grands programmes sont exécutés, souvent avec l’aide technique chinoise. Aussi, sur le plan strictement social, il faut admettre une réussite globale. La multiplication d’administrations parallèles aide à contenir le chômage, autour de 7 %, ce qui n’est pourtant pas la méthode la plus saine économiquement. […] 

 

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commentaires

A
Votre article est vraiment très bien écrit et l'analyse faite est réellement digne d’intérêt !
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D
Une politique du bien commun contrairement à la politique de l'enrichissement d'un petit nombre !
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A
Très bien votre article !Le concept de nation est mort aujourd'hui, je ne pense pas qu'il soit possible de revenir à ce type de dirigeant en Europe.
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A
<br /> Je l'aimais bien comme tous ceux qui refusent d'etre serviles au lobby américano-sioniste .<br />
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